Chronique de Josiane Aubert : Egalité, la Suisse des petits pas

Notre pays est le champion de la lenteur dans l’évolution des progrès sociétaux; prenons la marche vers l’égalité entre femmes et hommes. Les suissesses ont été les dernières européennes à obtenir le droit de vote en 1971, et la lutte pour obtenir un congé maternité de 14 semaines a duré 56 ans…

Les prochains pas sont à l’horizon. La session des Chambres a empoigné quelques objets intéressants à cet égard: le renouvellement pour quatre ans du crédit fédéral pour l’encouragement à la création de crèches et garderies a passé la rampe de justesse. Sous la pression de l’initiative de « Travail Suisse », la nécessité d’un congé paternité a enfin été reconnue; il faudra encore s’entendre sur sa durée. 2 ou 4 semaines ? C’est bien maigre face aux pays qui nous entourent… mais ce sera un premier pas qu’il faudra engranger !

La réforme de la fiscalité des entreprises a passé la rampe des deux Chambres et sera introduite avec une compensation sociale non négligeable  par un financement complémentaire de l’AVS; ce compromis n’est pas idéal, mais il permet de repousser le spectre d’augmenter l’âge de la retraite des femmes; une telle augmentation serait très problématique aussi longtemps que l’égalité salariale n’est pas atteinte ; de plus, les femmes travaillent souvent à temps partiel, sont moins bien payées, elles touchent donc une retraite du 2ème pilier plus faible que les hommes, elles ne doivent pas encore payer ces injustices en travaillant un an de plus ! Le « paquet » qui lie fiscalité des entreprises et AVS, même imparfait, évite aussi une trop forte augmentation de la TVA pour financer l’AVS. Ce compromis typiquement helvétique vaut la peine d’être soutenu, c’est un petit pas dans la bonne direction.

Les Chambres sont aussi en passe d’exiger des entreprises de plus de 100 employés qu’elles prouvent l’égalité salariale qu’elles appliquent ; insuffisant, mais bon début.

Le Canton de Vaud a décidé de donner lui aussi un coup de pouce concret à l’égalité salariale par plusieurs mesures, dont celle de comptabiliser les années de garde des enfants dans le cursus professionnel des femmes pour fixer leur salaire initial à l’engagement. Une bonne manière de montrer la valeur mise à cette tâche éducative si importante pour l’ensemble de la société sans pénaliser ceux qui l’accomplissent. Restera à convaincre plus d’hommes de travailler eux aussi à temps partiel lorsque les enfants sont petits. Ce sera une façon efficace d’arriver à l’égalité salariale, car les employeurs ne pourront plus prétendre que l’arrivée d’un enfant pénalise la femme dans sa carrière !

Il vaut la peine d’engranger chaque petit pas vers l’égalité, c’est la seule méthode pour avancer dans le pays des helvètes !

Josiane Aubert, ancienne conseillère nationale